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25 novembre 2015 3 25 /11 /novembre /2015 17:27

J'ai beaucoup emprunté à l'histoire des Girondins d'Alphonse de Lamartine pour les dernières notes de ce blog consacrées à la Révolution française. Il paraît intéressant de replacer l’œuvre et son auteur dans leur contexte.

Alphonse de Lamartine naquit à Mâcon (Saône-et-Loire) le 21 octobre 1790. Il est le fils de Pierre de Lamartine et d'Alix des Roys.

*1-Pierre de Lamartine naquit à Mâcon le 21 septembre 1752 et décéda le 30 août 1840 à Mâcon. Il est issu d'une famille d'abord appelée « Alamartine », qui fut anoblie en 1651 et devint « de Lamartine ». Il fut capitaine au régiment Dauphin-cavalerie et fut fait « chevalier de Pratz ». Il épousa Alix des Roys à Lyon le 7 janvier 1790. Ils eurent 8 enfants : 6 filles et 2 fils dont l'un décéda à l'âge de 4 ans et l'autre étant Alphonse.

Pierre de Lamartine se trouvait aux Tuileries le 10 août 1792 pour défendre le roi (Louis XVI). Il fut fait prisonnier, parvint à s'évader, ce qui lui sauva la vie car les nobles arrêtés le 10 août furent massacrés soit le jour même soit au début septembre 1792. Il fut à nouveau arrêté et emprisonné mais après les massacres de septembre. Il fut libéré après thermidor c'est-à-dire après l'exécution de Robespierre (le 28 juillet 1794).

En 1797, Pierre et Alix achetèrent le domaine de Milly en Saône-et-Loire à une quinzaine de kms au nord-ouest de Mâcon. Alphonse conserva toute sa vie le souvenir de Milly qui devint « Milly Lamartine » en 1902. Le domaine comportait une maison bourgeoise connue actuellement sous le nom de « château de Milly ».

En 1801, Pierre et Alix achetèrent également le château de Saint Point en Saône-et-Loire. Ils en feront cadeau à Alphonse lors de son mariage en 1820. Lorsqu'ils en firent don, ce château était passablement délabré. Alphonse et son épouse le firent complètement restaurer. Depuis, ce château est souvent appelé « château Lamartine ».

*2-Alix Des Roys : elle naquit à Lyon le 8 novembre 1766 et décéda à Mâcon le 16 novembre 1829. Elle est la fille de Jean-Louis Des Roys (1724/1798) qui fut avocat au parlement de Genève, puis à la Cour de Lyon et intendant général du duc de Chartres (qui récupéra le titre de duc d'Orléans à la mort de son père en 1785 et fut surnommé « Philippe-Égalité le 15.9.1792). Sa mère née Marguerite Gavault le 8 août 1737 à Saint Symphorien (Rhône) fut sous gouvernante des enfants de la duchesse et du duc de Chartres qui devinrent d'Orléans etc. Alix des Roys fut donc élevée avec des enfants dont l'un deviendra le dernier roi de France de 1830 à 1848 sous le nom de Louis-Philippe.

De 1801 à 1829, Alix des Roys tint un journal intime qu'Alphonse fit publier en 1877 sous le titre : « le manuscrit de ma mère ». Pour beaucoup d'auteurs cela fait classer Alix Des Roys parmi les écrivains.

*3-Alphonse : Le rappel de sa parenté montre qu'Alphonse est issu d'une famille profondément royaliste.

-D'octobre 1803 à février 1807, Alphonse fut mit dans un pensionnat des Pères de la Foi (des Jésuites) à Belley (Ain). Durant ce séjour, Alphonse se lia d'amitié avec plusieurs élèves dont il conservera pour au moins 2 d'entre eux (Louis de Vignet et Aymon de Virieu) la relation jusqu'à la fin de sa vie (ou de la leur).

-En 1811, Alphonse effectua son premier voyage en Italie. A Naples, il eut une liaison sans suite avec une napolitaine nommée Mariantonia (surnommée Antoniella). Il en rappellera le souvenir dans « Graziella » en 1849. En partant en Italie, Alphonse s'était arrêté les 15 et 16 juillet chez son ami Louis de Vignet à Servolex (aujourd'hui La Motte-Servolex dans la banlieue de Chambéry). Ce Louis de Vignet était un neveu par sa mère des frères Joseph et Xavier De Maistre.

-En 1812, Alphonse rentre à Milly dont il est nommé Maire. Il a une liaison avec une Nina de Cormatin épouse de Pierreclos qui lui donne un fils naturel prénommé Léon né le 1er mars 1813 et décédé le 27 juillet 1841.

-En 1814, pendant l'exil de Napoléon à l'île d'Elbe, il s'engage dans l'armée (compagnie de Noailles) et fait partie des gardes du corps de Louis XVIII. Il se réfugie en Suisse durant les Cent jours, reprend son poste après Waterloo (18 juin 1815) mais démissionne de l'armée le 1er novembre 1815.

-En 1816, Alphonse effectue son premier séjour à Aix-les-Bains, il en effectuera 8 au total qui auront une grande importance dans sa vie. Ces séjours ont été récapitulés et commentés par Paul Couturier dans un livre édité par la ville d'Aix en décembre 1984 et intitulé : « Monsieur de Lamartine à Aix en Savoie ». Paul Couturier chirurgien-dentiste à Aix-les-Bains s'intéressa à l'histoire locale sur laquelle il publia plusieurs ouvrages. Il naquit à Balbigny dans la Loire le 6 novembre 1920 et décéda à Aix-les-Bains le 5 juin 1985. Je lui ai emprunté une partie des informations qui figurent dans cette note.

On trouvera en illustration, une photo du buste de Lamartine tel qu'il fut inauguré le 12 août 1962 sur la colline de Tresserve (Savoie) à quelques pas de la Mairie et en surplomb au dessus du lac. Malheureusement, pour mon goût, le buste tourne la tête au lac, « son » lac qu'il chanta si bien : « O lac ! L'année à peine a fini sa carrière... ». Pour les lecteurs lointains, il s'agit du lac du Bourget.

*4-Voici la liste des 8 séjours de Lamartine à Aix :

-du 6 au 26 octobre 1816 : Alphonse était arrivé le 15 juillet chez son ami Louis de Vignet avant de rejoindre Aix où il logea à la pension Perrier. Ce Perrier (Pierre-François) né en 1745 en Haute Savoie (et décédé en avril 1833) avait fait une carrière de chirurgien militaire, dans l'armée sarde, avant de se retirer à Aix en 1791 où il tint une pension pour accueillir les curistes et touristes. C'est en faisant des travaux dans les sous-sols de la même maison en 1772 qu'avaient été redécouverts les anciens thermes romains. C'est durant ce séjour de 1816 qu'Alphonse fit la connaissance de Julie Charles (Elvire). Voir ci dessous point 5 consacré à Julie Charles.

-du 21 août au 17 septembre 1817 : Il retourne à la pension Perrier et attend Julie Charles en vain. C'est durant ce séjour qu'il compose le fameux poème : « le lac » qui sera intégré aux « Méditations poétiques » en 1820.

-du 30 juillet au 24 août 1819 : Césarine une sœur d'Alphonse avait épousé Xavier de Vignet un frère de Louis ami d'Alphonse. Alphonse était arrivé en Savoie le 15 juillet 1819 pour visiter son beau-frère et sa sœur alors enceinte. A Chambéry il fait la connaissance de Mary-Ann Birch qu'il retrouve à Aix, Alphonse logeant à nouveau à la pension Perrier tandis que Mary-Ann et sa mère logent à la pension Perret.

Jean-Jacques Perret né à Aix le 25 janvier 1762 se trouvait depuis 3 ans en Egypte lorsque Bonaparte et son armée y débarquèrent en 1798. il servit d'interprète, il revint en Savoie en 1811. Il a donné son nom à un collège d'Aix-les-Bains.

-du 15 avril au 15 juin 1820 : Le mariage avec Mary-Ann ayant été décidé, Alphonse revint à Aix accompagné de sa mère et de Sophie sa dernière sœur. Ils logèrent à la pension Jean-Jacques Perret. Le mariage avec Mary-Ann se fit en 2 temps : mariage anglican à Genève le 28 mai 1820 et mariage catholique le 6 juin à la chapelle du château des ducs de Savoie à Chambéry. En devenant madame de Lamartine, Mary-Anne francisa son nom en Marianne. Mary-Ann était une femme très cultivée qui fut en outre peintre et sculpteur. Ils partirent pour Naples le 15 juin où Alphonse avait été nommé secrétaire d'ambassade.

-de juin au 17 septembre 1821 : retour à Aix d'Alphonse de Marianne et de leur fils Alphonse né à Rome le 14 février 1821 (décédé le 4 novembre 1822 à Paris). Ils logèrent d'abord chez Roissard, logement qu'ils quittèrent très vite pour la villa Chevalley que les « Napoléonides » avaient occupée avant eux.

-en juillet et août 1823 : logement à la pension Jean-Jacques Perret. Le 14 mai était née à Mâcon une fille nommée Julia (décédée à Beyrouth le 7 décembre 1832)

-du 1er juin à fin août 1825 : logement à la pension Jean-Jacques Perret. Le 3 juillet Alphonse avait été nommé ambassadeur extraordinaire auprès du Grand-Duc de Toscane

-du 2 juillet au 2 septembre 1830 : nouveau séjour à la pension Jean-Jacques Perret. C'est durant ce séjour qu'eut lieu à Paris la Révolution des 26 au 28 juillet 1830 qui mit fin au règne de Charles X et amena sur le trône Louis-Philippe. Alphonse envoya sa démission d'ambassadeur.

*5-Julie Charles : Elle naquit à Paris le 4 juillet 1784 sous le nom de Françoise Julie Bouchaud des Hérettes d'une mère créole de Saint-Domingue et d'un père nantais. Après quelques années passées à Saint-Domingue (?), elle fut élevée par un oncle qui habitait à Saint Paterne près de Tours dans une propriété appelée « grange Saint Martin ».

Le 25 juillet 1804, elle avait 20 ans, à Saint Paterne, elle épousa Jacques Charles né le 12 novembre 1746, il avait presque 58 ans, physicien déjà célèbre en son temps. Ce Jacques Charles avait réalisé des expériences sur l'emploi du gaz hydrogène, mais par manque de chance pour lui, vis-à-vis de l'histoire, les frères Montgolfier eurent une longueur d'avance sur lui : Le 4 juin 1783, les frères Joseph et Etienne Montgolfier avaient lancé leur premier ballon propulsé par air chaud, tandis que Jacques Charles ne réalisa son premier vol gonflé à l'hydrogène que le 27 août 1783 soit presque 3 mois plus tard. Les Mongolfier réalisèrent le premier vol humain sur mongolfière le 21 novembre 1783 et Jacques Charles le 1er décembre de la même année soit seulement 10 jours plus tard. On pourra méditer que c'est seulement 186 ans après le premier envol d'un ballon que la mission Apollo 11 permettra à l'Homme de marcher sur la lune !

Pour l'intérêt des Savoyards, Paul Couturier signale le 6 mai 1784, l'envol d'une montgolfière montée par Xavier de Maistre et un ingénieur nommé Brun, depuis le parc de Buisson rond à Chambéry avec un vol de 25 minutes avant de se poser à Challes-les-Eaux.

Pour en revenir à Julie Charles, elle vint en cure à Aix en 1816, logea dans la même pension qu'Alphonse, avec des chambres séparées seulement par une porte. Le 10 octobre, en difficulté sur le lac du Bourget, elle fut secourue par Alphonse et naquit leur idylle.

Elle mourut de tuberculose le 18 décembre 1817. Jacques Charles jaloux, la fit inhumer anonymement dans un cimetière inconnu. Alphonse rappellera le souvenir de Julie, non seulement dans des poèmes, mais aussi en 1849 dans « Raphaël », à moitié biographie, à moitié roman. En 1834, Alphonse participa à la fondation de la « Société française pour l'abolition de l'esclavage ». Certains auteurs y voient l'influence des attaches familiales de Julie à Saint Domingue.

*6-Alphonse suite :

On a vu dans les paragraphes qui précédent, que Lamartine fit une brève carrière militaire (en 1814/1815), une carrière diplomatique un peu plus longue (de 1820 à 1830), ensuite, il voyagea (en Orient) puis commença une carrière politique en étant élu député une première fois en 1837 puis réélu en 1842 (à Mâcon). Il était jusqu'à cette date royaliste, mais « légitimiste », il rompit avec le régime (de Louis-Philippe, la « monarchie de juillet ») en 1843, puis évolua vers le républicanisme.

C'est vers la fin de 1842 qu'il commença à écrire l'histoire des Girondins. Est-ce que ce sont ses nouvelles dispositions d'esprit qui le conduisirent à écrire l'histoire de la Révolution française ou est-ce l'écriture de cette histoire qui le fit évoluer ? Je ne saurais le dire.

Toujours est-il que la publication en 1847 eut un énorme succès ; voir la note N°251 http://jean.delisle.over-blog.com/2015/08/les-girondins-n-251.html. A cette époque, Alphonse était déjà célèbre : par sa carrière diplomatique, par son mandat de député, parce qu'il avait été fait chevalier de la légion d'honneur le 10 mai 1825 et élu à l'Académie française le 3 novembre 1829. Il faut dire qu'il écrivit et publia beaucoup et dans des domaines diversifiés et que nombre de ses œuvres eurent, de son temps, beaucoup de succès ; voir point suivant.

L'histoire des Girondins venait tout juste d'accroître sa popularité lorsque éclata la Révolution de février 1848 qui mit fin non seulement au règne de Louis-Philippe mais à la royauté en France. Cette révolution eut de nombreuses causes : disette, épidémie de choléra, crise financière… mais surtout opposition à François Guizot chef du gouvernement.

Lamartine y participa, le 25 février vers midi il proclama la seconde République française et le soir même un gouvernement provisoire était constitué. Alphonse de Lamartine en fut ministre des Affaires étrangères et de fait chef provisoire du Gouvernement. C'est à ce titre qu'il signa le 27 avril 1848 le décret sur l'abolition de l'esclavage, décret préparé par Victor Schoelcher .

Le tableau de Félix Philippoteaux montrant Alphonse de Lamartine le 25 février 1848 sur le perron de l'hôtel de ville de Paris refusant le drapeau rouge, est très connu.

Le 10 décembre 1848 se déroula l'élection du Président de la République. Il y avait 6 candidats dont Alphonse mais aussi Louis Napoléon Bonaparte, officiellement neveu de Napoléon (voir note N°7 http://jean.delisle.over-blog.com/article-petites-histoires-58615886.html).

Dans la population, le souvenir de Napoléon était encore tellement vivace que le nom de Bonaparte balaya tout. Sur 7.497.000 votants (74,8 % des inscrits), Bonaparte remporta 5.434.226 voix et le pauvre Alphonse 17.210 ! Cela mit fin à sa carrière politique.

En 1860, à court d'argent il dut vendre le domaine de Milly.

Alphonse décéda à Paris le 28 février 1869 et fut inhumé au château de Saint Point où il rejoignit Marianne décédée le 24 mai 1863.

*7-son œuvre : en voici les principaux éléments (non exhaustifs):

-dans le domaine de l'Histoire :

Histoire des Girondins 1847

Trois mois au pouvoir 1848

Histoire de la Révolution de 1848 : 1849

Histoire de la Restauration : 1851

Histoire des Constituants : 1853

Histoire de la Turquie : 1854

Histoire de la Russie : 1855

-récits de voyages :

Voyage en Orient : 1835

Nouveau voyage en Orient : 1853

-biographies :

Histoire de l'humanité par les grands hommes : en 3 volumes de 1852 à 1854

-romans en prose :

Raphaël 1849 et Graziella 1849

-romans en vers :

Jocelyn 1836

la chute d'un ange 1838

-théâtre :

Médée (créé en 1813, publié en 1873)

Toussaint Louverture 1850. Ce Toussaint Louverture de Saint Domingue avait pris la tête du soulèvement commencé en 1791 pour obtenir l'abolition de l'esclavage. Il mourut emprisonné en France dans le Jura le 7 avril 1803

-poésie :

méditations poétiques 1820

nouvelles méditations poétiques 1823

la mort de Socrate 1823

le dernier chant du pèlerinage d'Harold (hommage à Lord Byron mort en avril 1824 alors qu'il était parti soutenir les Grecs dans leur révolte contre les Turcs, voir note N°9 http://jean.delisle.over-blog.com/article-grece-independance-58616338.html)

L’œuvre d'Alphonse de Lamartine mériterait probablement d'être mieux connue.

J.D. 25 novembre 2015

buste de Lamartine à Tresserve (Savoie), photo J.D. 23 novembre 2015 et statue de Lamartine dans l'anse ouest de la baie de Châtillon, photo J.D. 18 juin 2016
buste de Lamartine à Tresserve (Savoie), photo J.D. 23 novembre 2015 et statue de Lamartine dans l'anse ouest de la baie de Châtillon, photo J.D. 18 juin 2016

buste de Lamartine à Tresserve (Savoie), photo J.D. 23 novembre 2015 et statue de Lamartine dans l'anse ouest de la baie de Châtillon, photo J.D. 18 juin 2016

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